Aussi appelé bolet de fiel, chicotin ou faux cèpe, le bolet amer (Tylopilus felleus) prête souvent à confusion avec le cèpe de Bordeaux. Chapeau brun à brun tabac, parfois craquelé par temps sec, silhouette trapue, tubes clairs… la ressemblance est réelle. Pourtant, plusieurs indices trahissent l’imposteur : un réseau sombre en mailles serrées sur la partie haute du pied (chez le cèpe, le réseau est plus fin et clair), des pores qui rosissent en vieillissant, une chair blanche qui ne bleuit pas à la coupe, et surtout une amertume immédiate et persistante au bout de la langue (sans avaler). On le rencontre fréquemment en lisière ou sous hêtres, épicéas et pins, de l’été à l’automne, souvent en sols acides. Odeur faible, spore rosée, goût irrémédiablement amer même cuit : autant de signes pour l’identifier sans l’embarquer en cuisine.
Reste la grande question : peut-on le manger ? Le bolet amer n’est pas toxique, mais il est considéré comme non comestible : son goût extrêmement amer ruine tout plat, même en petite quantité. Mieux vaut donc savoir l’identifier… et le laisser dans le panier des “à ne pas cuisiner”.
Comment identifier le bolet amer à coup sûr ?
Il est important de savoir reconnaître le bolet amer parmi les multiples variétés qui lui sont identiques en apparence. Pour ce faire, sachez que plusieurs éléments caractéristiques de ce faux cèpe permettent de l’identifier. Il y a entre-autres :
- la couleur de son chapeau
- sa chair
- son pied
Lorsque vous analysez chacune de ces différentes parties de la plante, il est donc possible de la reconnaître parmi les végétaux semblables.
Le chapeau du bolet amer
Le bolet de fiel est facilement identifiable en partant de la couleur de son chapeau. Il affiche en effet une coloration marron ou beige foncé. Le chapeau de ce champignon amer forme des craquelures pendant la saison sèche. Par ailleurs, vous pouvez également vous baser sur la taille de cette tête pour reconnaître la plante. Elle a approximativement un diamètre de 10 centimètres avec une sorte de bonnet rond en haut.
La chair du bolet amer
Elle a un aspect solide et sensiblement lourd. La chair du chicotin est également reconnaissable à travers sa couleur qui est le blanc. Par ailleurs, ce qui est susceptible de vous convaincre le plus, c’est le goût très amer de cette espèce végétale. Il suffit en effet de mettre un court instant cette plante sur la langue pour s’en apercevoir. C’est d’ailleurs ce qui fait que l’adjectif amer a été ajouté à son nom.
Le pied ou la tige du cèpe amer
Le champignon amer peut aussi être reconnu en observant son pied. Cette partie du faux cèpe est appelée stipe et a une forme de bulbe. Elle a par ailleurs une longueur pouvant aller de 3 à 15 cm. Lorsque la plante grandit, sa tige s’allonge davantage et tend plus tard à se courber.
Attention ! Ne pas confondre le bolet amer avec le cèpe de Bordeaux
En raison de leur ressemblance, il est possible de prendre le cèpe de Bordeaux pour le faux cèpe et vice-versa. Vous devez donc faire preuve d’un esprit d’analyse pour réussir une bonne identification.
Le vrai cèpe ou le cèpe de Bordeaux est également connu sous le nom de cèpe d’été. Il peut se distinguer du faux à travers les pores repérables au niveau de son pied. Ils ont une couleur blanche au départ puis deviennent jaunes après avant d’adopter finalement une couleur semblable au vert. Il est donc important de comprendre que le bolet comestible n’a jamais de pores roses comme cela est remarquable chez la plante amère.
Cependant, si vous vous basez uniquement sur la couleur rose des spores du champignon amer, vous pouvez vous tromper. En effet, le pied d’un jeune pousse de bolet de fiel n’a généralement pas cette couleur. C’est en grandissant que le rose apparaît. Il convient donc que vous confrontiez toutes les caractéristiques de la plante pour parvenir à l’identifier.
Qu’est-ce qui est à l’origine du goût amer du bolet de fiel ?
Si le bolet de fiel (ou chicotin) est si redouté en cuisine, c’est parce qu’il renferme des composés amers de la famille des glycosides. Parmi les références utilisées par les chimistes pour qualifier l’amertume figure l’amarogentine, substance au pouvoir amer extrêmement élevé. Sans entrer dans les débats de composition exacte, retenons que le bolet de fiel est riche en molécules au profil sensoriel proche : une seule bouchée suffit à saturer les papilles.
Pour situer l’intensité : l’amarogentine est souvent citée avec un indice d’amertume voisin de 58 millions, quand la quinine plafonne autour de 200 000. Autrement dit, ces composés sont perçus à des concentrations infimes. C’est pourquoi le goût amer du bolet de fiel domine toutes les autres saveurs et peut ruiner un plat entier même si un seul spécimen s’y glisse.
Autre mauvaise nouvelle pour la casserole : cette amertume est thermostable et largement hydrosoluble. La cuisson, le séchage ou un long mijotage n’y changent presque rien ; au contraire, le bouillon peut se charger en molécules amères. De plus, l’amertume est présente dans tout le carpophore (chapeau, tubes, pied), avec une concentration souvent plus marquée dans les tubes des exemplaires âgés.
Du point de vue biologique, cette amertume extrême joue probablement un rôle de défense contre la prédation : rares sont les animaux (et humains) qui insistent après un premier contact. Sur le plan toxicologique, ces composés amers ne sont pas recherchés en cuisine, mais ils ne sont pas considérés comme toxiques aux faibles doses liées à une simple dégustation d’identification (on touche la pointe de la langue et on recrache immédiatement). Cela suffit amplement pour reconnaître le champignon sans l’ingérer.
Conseil de terrain : en cas de doute, pratiquez une micro-dégustation : touchez la langue avec un minuscule fragment cru, recrachez et rincez. Une amertume franche et rapide, tenace plusieurs minutes, est un indice majeur du bolet de fiel.
Peut-on consommer ou non le bolet amer ?
La présence, même en faible proportion, de l’amarogentine dans le faux cèpe reste une preuve que ce champignon n’est pas comestible. En effet, il peut avoir des effets néfastes sur votre organisme lorsqu’il est consommé en grande quantité. Ainsi, le cèpe amer peut engendrer plusieurs maux tels que :
- les troubles digestifs,
- les douleurs d’estomac,
- les vomissements,
- la diarrhée etc.
Aussi, le goût très amer de cette plante est une autre raison pour laquelle elle ne peut pas servir d’aliment à l’homme. À l’état cru, le faux cep n’est pas autant amer qu’il l’est après cuisson. Il faut donc comprendre que le chicotin ne peut pas être mangé.
En conclusion, retenez que le bolet amer n’est pas un poison, mais… lorsqu’il est consommé en grande quantité, il peut être la cause de plusieurs malaises. Il convient donc de s’en méfier !
