Évacuer l’eau de pluie quand on manque d’exutoire n’est pas simple. Le puits perdu (aussi appelé puits d’infiltration) est une solution courante en maison individuelle… mais attention : il est strictement réservé aux eaux pluviales et encadré par des règles d’urbanisme, de voisinage et d’assainissement. Voici un guide “maison & bricolage” pour comprendre ce qui est autorisé, les distances à respecter, les contrôles possibles et les bonnes pratiques de mise en œuvre, avec des tableaux récapitulatifs pour décider sereinement.
Puits perdu : de quoi parle-t-on (et de quoi on ne parle pas) ?
Un puits perdu est un ouvrage enterré, rempli de matériaux drainants (galets, blocs alvéolaires, buses perforées), qui reçoit les eaux de pluie (toitures, terrasses) pour les laisser s’infiltrer dans le sol. Ce n’est pas une fosse d’épuration, ni une solution pour les eaux usées domestiques (interdit). Il se distingue des tranchées d’infiltration (linéaires) et des noues (dépressions végétalisées).
Réglementation : les grands principes à retenir
- Eaux pluviales uniquement : l’infiltration des eaux usées (toilettes, cuisine, bains) dans un puits perdu est illégale. Les eaux usées relèvent de l’assainissement collectif (tout-à-l’égout) ou autonome (ANC) surveillé par le SPANC.
- Subsidiarité locale : le PLU/PLUi (règlement d’urbanisme) et, parfois, un règlement d’assainissement ou un arrêté municipal précisent les conditions de collecte et d’infiltration des eaux pluviales (interdictions locales, distances, débit de fuite, etc.).
- Protection des tiers et des ouvrages : un puits perdu ne doit ni déstructurer un voisinage (remontées d’eau, affouillement), ni fragiliser les fondations, ni polluer une nappe, un puits, une source.
- Étude du sol : l’infiltration suppose un sol perméable. Les terrains argileux, les nappes peu profondes, les zones inondables ou polluées sont inadaptés.
Distances usuelles et implantations conseillées
Les distances ci-dessous sont des ordres de grandeur courants observés dans les prescriptions locales. Référez-vous toujours aux documents de votre commune/intercommunalité (PLU, règlement eaux pluviales) et, en cas de doute, demandez un avis au service urbanisme ou au SPANC.
Élément à protéger | Distance conseillée | Pourquoi |
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Fondations de la maison | ≥ 5 m (souvent 5 à 10 m) | Éviter les déstabilisations et humidités de pied de mur |
Limite de propriété | ≥ 3 m (à vérifier au PLU) | Ne pas reporter l’eau chez le voisin, limiter les nuisances |
Puits, forage, source | ≥ 30 m (voire davantage localement) | Protéger les captages d’eau potable |
Arbres à système racinaire puissant | ≥ 3 m | Limiter obstructions et soulèvements |
Canalisations/ouvrages enterrés | Hors zones de servitudes | Préserver l’accessibilité et la durabilité |
Faut-il une autorisation ? Qui contacter ?
Situation | Interlocuteur | Ce qu’on vérifie | Document/Action |
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Maison raccordée au tout-à-l’égout | Service urbanisme / PLU | Gestion des eaux pluviales à la parcelle (obligation possible) | Déclaration en mairie si travaux modifiant l’aspect ou les réseaux |
Maison en ANC (pas de réseau collectif) | SPANC | Étanchéité séparation eaux usées / eaux pluviales | Contrôle à la vente/diagnostic périodique |
Zone sensible/inondable | Urbanisme / service eau | Interdiction ponctuelle d’infiltrer, solutions alternatives | Orientation vers tranchées, noues, régulation de débit |
Dimensionnement : combien de volume prévoir ?

Le volume d’un puits perdu dépend de la surface collectée (toiture/terrasse), de la pluviométrie locale et de la perméabilité du sol (test d’infiltration). À défaut d’étude, on retient souvent des approches prudentes : sur sol filtrant, une capacité de 30 à 50 litres par m² de toiture offre une première base (à affiner selon vos données locales).
Surface collectée | Volume mini (L) – base 30 L/m² | Volume confort (L) – base 50 L/m² | Exemple d’ouvrage |
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30 m² | 900 | 1 500 | 1 cuve alvéolaire 1 m³ + graviers |
60 m² | 1 800 | 3 000 | 2 modules alvéolaires empilés |
100 m² | 3 000 | 5 000 | Puits avec buses perforées + lit drainant |
Astuce : associez un regard dégrilleur et un préfiltre (feuilles/sables) avant le puits pour maintenir la perméabilité dans le temps.
Implantation et mise en œuvre (pas-à-pas)
- Vérifier la faisabilité : consulter PLU/règlements, demander un avis au service compétent en cas de doute ; tester l’infiltration (trou d’essai rempli d’eau, chronométrage).
- Choisir l’emplacement : respecter les distances, privilégier un point bas, accessible pour l’entretien, loin des fondations.
- Dimensionner : surface collectée × volume par m² ; sur sol peu perméable, prévoir plus ou passer à une solution alternative (tranchées, noue, stockage + rejet régulé).
- Creuser : fouille stable, fond plan, pas de nappe affleurante ; géotextile en parement pour éviter la migration des fines.
- Installer : modules alvéolaires/buses perforées ; remplir l’enveloppe de granulats (32/63), poser un couvercle/plaquage solide (piéton).
- Prétraitement : panier dégrilleur, décanteur sable/feuilles, siphon anti-odeur si raccord à des zones organiques (rare en pluvial).
- Contrôle & remise en état : test d’infiltration à l’arrosoir, remise en place du terrain et plantation adaptée (éviter racines agressives).
Entretien : simple mais indispensable
- Deux fois par an : vider et nettoyer le panier dégrilleur, curer le regard de visite, contrôler l’absence de colmatage.
- Après gros orage : vérifier qu’aucun reflux n’apparaît ; si l’eau stagne longtemps, faire curer et, au besoin, repenser la capacité.
- Feuilles et sédiments : grillages sur gouttières, crapaudines, dauphins propres = puits durable.
Budget indicatif
Poste | Coût estimatif | Commentaires |
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Étude simple d’infiltration | 0–300 € | De DIY (test seau) à avis pro selon contexte |
Modules alvéolaires (1 m³) | 200–400 € | Capacité variable, piéton |
Buses béton perforées + granulats | 150–350 € | Selon diamètre/profondeur |
Regard + préfiltre | 60–150 € | Entretien facilité |
Terrassement (location mini-pelle) | 100–200 €/jour | + évacuation des déblais |
Cas d’incompatibilité et alternatives
- Sol argileux, nappe haute, zone inondable : infiltration déconseillée → privilégier noue végétalisée, tranchées drainantes étalées, stockage + débit de fuite (régulateur) vers réseau pluvial si autorisé.
- Parcelle trop petite : mini-rétention (cuve tampon) + arrosage jardin ; réduire impérativement les surfaces imperméables (dallages drainants).
- Proximité de captage : distances augmentées ou interdiction d’infiltrer ; se rapprocher du service eau/urbanisme.
Points de vigilance “légal/bon sens”
- N’acheminez jamais les eaux usées vers un puits perdu : c’est interdit et polluant.
- Ne reportez pas l’eau chez le voisin (surverse, drain orienté) : responsabilité du propriétaire engagée en cas de dommage.
- Conservez une trace écrite de vos échanges (mail mairie/SPANC) et un plan des ouvrages enterrés.
Le puits perdu peut être une solution pertinente pour infiltrer les eaux pluviales à la parcelle, à condition de respecter la réglementation locale, de choisir un sol adapté, d’implanter l’ouvrage à bonne distance des fondations et de prévoir un prétraitement (dégrillage/décantation) pour durer. En cas de doute (sol argileux, zone sensible, voisinage proche), privilégiez les alternatives (noues, tranchées, rétention) et demandez un avis au service urbanisme ou au SPANC. Un peu de méthode, quelques contrôles réguliers… et vos pluies disparaîtront dans le sol sans dommage, ni pour votre maison, ni pour le voisinage.